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Roc d'Azur. Le Gapois Stéphane Tempier signe un numéro d'exception dans la 29ème édition du Roc d'Azur, qu'il s'adjuge après un long raid solitaire dans le Var.

 

Le départ du grand Roc 
© Christophe Mury/Vélo 101

Une dernière fois ce matin, le soleil s'extirpe de la mer Méditerranée pour venir se hisser tel un projecteur naturel au-dessus du Var, de son littoral et de ses collines sauvages. Le Roc d'Azur touche à sa fin avec la course mythique autour de laquelle se sont déclinés une grosse vingtaine d'épreuves et de randonnées, un incontournable salon du cycle et des animations époustouflantes. C'est l'heure de la classique éponyme. Celle qui intervient en conclusion d'une longue et intense saison olympique et que seuls quelques-uns ont eu l'audace de cocher parmi leurs objectifs. En quête d'une belle sortie sous les couleurs d'Orbea, Julien Absalon aurait pu être de ceux-là, mais il misera sur le plaisir avant tout, et c'est déjà un vrai plaisir que de  le revoir sur la première ligne du Roc, sur laquelle ne manqueront au fond que Jaroslav Kulhavy et Nino Schurter.

 

Par un temps splendide, le vrombissement de l'hélicoptère annonce à 9h30 le départ de la première vague. Au coup de pistolet, voilà le peloton des cadors qui fend l'air frisquet en direction du massif des Maures et de ses sites traditionnels. Le passage au Fournel est le premier lieu incontournable, c'est là aussi que se dessine un premier groupe de leaders. Par tradition, le vainqueur se trouve déjà dans cette échappée. Maxime Marotte (BH-SR Suntour-Peisey Vallandry) et son futur coéquipier Stéphane Tempier (TX Active-Bianchi) sont de la bonne. Puis le groupe s'égrène dans la montée de la Flûte, technique et vertigineuse sur son sommet. Les premières attaques individuelles se dessinent, et c'est Stéphane Tempier, qui bénéficie là de la présence de son coéquipier Tony Longo, qui se porte en tête à la faveur d'une descente. Constatant avoir creusé l'écart sur ses adversaires, le meilleur tricolore des Jeux de Londres décide d'insister.

 

Christoph Sauser emmène le trio poursuivant derrière Tempier 
© Christophe Mury/Vélo 101

A cet instant de la course, on est encore loin, très loin, de l'arrivée. Bien des pilotes avant lui se sont essayés dans des tentatives isolées, mais rarement ils sont parvenus à mener à bien un tel raid solitaire. Stéphane Tempier a pour lui l'expérience et l'intelligence. Sans jouer les chiens fous, il insiste dans les collines de l'arrière-pays, creuse l'écart dans les descentes, gère la différence dans les montées, et constate avec encouragement que la distance avec ses poursuivants se stabilise autour de la minute. Ses poursuivants ne sont pourtant pas les derniers venus : il y a là l'Allemand Jochen Kass (Multivan Merida Biking Team), son compatriote et tenant du titre Moritz Milatz (BMC MTB Racing Team) et le double lauréat du Roc d'Azur Christoph Sauser (Specialized Racing). Trois hommes surmotivés par l'enjeu d'une victoire à Fréjus.

 

A 20 kilomètres de l'arrivée se dresse alors le col du Bougnon et sa rampe de terre qui attire un large public. Stéphane Tempier fend la foule et savoure pour la première fois l'émotion de franchir le Bougnon en tête. De là, la mer Méditerranée se dessine en toile de fond. Les pilotes ne l'atteindront que par une succession de descentes ardues qui ne leur permettront pas de se relâcher, bien au contraire. D'ailleurs, la progression vers la mer est marquée par l'ascension de la bosse en ciment, sur laquelle commence à buter l'échappé solitaire. A cet instant, son avance est retombée à hauteur de la demi-minute. Sans paniquer, Stéphane Tempier gère son pécule et surtout le préserve sur la plage de la Galiotte. Le Gapois franchit décidément tous les secteurs stratégiques en tête, emprunte le Chemin des douaniers et se rapproche de la base nature. Pour autant rien n'est encore fait à l'entame d'un final roulant.

 

Fou de bonheur, Stéphane Tempier accroche le Roc d'Azur à son palmarès 
© Christophe Mury/Vélo 101

Heureusement, le soleil qui cogne sur Fréjus a chassé le vent. Sur la piste cyclable, Stéphane Tempier ne perd rien. A l'entrée sur la base nature, il est assuré de tenir bon et d'aller chercher la plus tonitruante victoire de sa carrière, lui qui se sera hissé cette saison parmi les meilleurs pilotes français, 11ème et 1er Bleu aux Jeux de Londres. Echappé bien avant les Clapiers, le pilote de 26 ans, qui portera l'an prochain les couleurs de BH-SR Suntour-Peisey Vallandry, signe à Fréjus un numéro qui restera dans les annales du Roc et succède au palmarès à Jean-Christophe Péraud, dernier Français lauréat de la classique il y a cinq ans. Le podium, lui, se décide au sprint entre ses trois poursuivants restés impuissants. Pour la 2ème place, Jochen Kass franchit la ligne le premier devant Moritz Milatz et Christoph Sauser.

 

Classement :

1. Stéphane Tempier (FRA, TX Active-Bianchi) les 56 km en 2h15'23" (24,8 km/h)
2. Jochen Kass (ALL, Multivan Merida Biking Team) à 15 sec.
3. Moritz Milatz (ALL, BMC MTB Racing Team) m.t.
4. Christoph Sauser (SUI, Specialized Racing) à 17 sec.
5. Alban Lakata (AUT, Team Topeak) à 2'27"
6. Maxime Marotte (FRA, BH-SR Suntour-Peisey Vallandry) à 2'54"
7. Wolfram Kurschat (ALL, Team Topeak) à 3'10"
8. Robert Mennen (ALL, Team Topeak) à 5'11"
9. Julien Taramarcaz (SUI, BMC MTB Racing Team) à 5'12"
10. Sébastien Carabin (BEL, Versluys Pro Mountain Bike) m.t.

 

TX Active-Bianchi - "Je suis resté sur l'excitation des Jeux et j'étais motivé pour rouler jusqu'au Roc. C'était plus une question de motivation qu'une question de préparation."

Stéphane Tempier jubile à Fréjus 
© Christophe Mury/Vélo 101

Stéphane, une victoire au Roc d'Azur, c'est la plus belle de toutes ?
C'est vraiment la plus belle, oui. J'y pensais depuis les Championnats du Monde. J'ai tâché de garder la motivation pour aller jusqu'au Roc. Dimanche dernier, j'ai couru le Championnat du Monde marathon à Ornans en guise de préparation pour cette échéance. Mais ces deux derniers jours, j'ai eu un peu peur car je commençais à avoir mal à la gorge. J'ai pensé que j'allais tomber malade, finalement ce sera sans doute pour demain donc c'est nickel !

En solitaire la majeure partie de la course, tu as réalisé un sacré numéro...
Ça a d'abord été une belle course d'équipe avec Tony Longo. Je suis parti dans la descente, lui descendait beaucoup moins vite, et du coup ça a fait un trou. J'ai fait un bout tout seul. Je me suis alors dit qu'il fallait y aller. On est au Roc, et ici quand on peut prendre quelques secondes, il ne faut pas hésiter. Des trous comme ça, c'est rare. J'ai décidé d'y aller, en me disant que si ça rentrait il y avait toujours Tony Longo derrière.

Avais-tu des informations sur les écarts ?
Oui. Au franchissement du col du Bougnon je savais que mes poursuivants étaient à une minute. Là, je me suis dit que ça pouvait le faire. Après, j'entendais plutôt 30 secondes. Je voyais bien que l'écart se réduisait, mais en sortant de la plage j'avais toujours ces 30 secondes d'avance. En emmenant bien, et sachant qu'à trois derrière ils se regarderaient forcément un peu, ça m'a bien sauvé. Sur la fin, ça devenait dur sur la piste cyclable. Mais j'ai eu de la chance car aujourd'hui il n'y avait pas trop de vent.

Comment as-tu vécu ce Roc seul en tête ?
C'est vrai que parfois je me sentais seul, ne connaissant pas trop les écarts. Je suivais la moto qui était devant ! Et quand on arrive sur des endroits où il y a beaucoup de monde, comme le col du Bougnon, ça devient vraiment motivant. Le plus dur, c'est resté la bosse en ciment. Là, il ne faut pas craquer, essayer de tenir jusqu'à la plage pour finir à bloc sur la piste cyclable.

Que représente le Roc d'Azur pour un pilote ?
Une victoire sur le Roc d'Azur, ça reste sur un palmarès. Quand on voit qui s'est imposé ici, ça compte. C'est un événement très médiatique, c'est une très belle course à gagner. Franchir le col du Bougnon seul en tête, c'était impressionnant. On voit à quel point le Roc est populaire.

Gagner le Roc au terme d'une saison olympique durant laquelle tu t'es battu dès le début de l'année pour ta place à Londres, il fallait le faire...
C'est vrai que la saison a été longue. Pour moi elle a commencé en février au Portugal. Cet été, je suis resté sur l'excitation des Jeux et j'étais motivé pour rouler jusqu'au Roc. C'était plus une question de motivation qu'une question de préparation. Celle-ci, je l'avais faite pour les JO et je l'ai ensuite entretenue.

Stéphane Tempier seul en tête dans les sentiers du massif des Maures 
© Ch.Mury/Vélo 101

Depuis combien de temps rêvais-tu de remporter cette classique du VTT ?
Ça fait un moment ! L'année dernière je n'étais pas venu, étant cramé. J'étais déjà parti en vacances ! Quand je le prépare, c'est au moins pour essayer de faire un podium. Maintenant ça arrive souvent groupé et au sprint je ne suis pas exceptionnel. Aujourd'hui ça m'a bien arrangé d'arriver tout seul.

Ta saison ainsi bouclée, te projettes-tu déjà sur la saison 2013 ?
Oui. Je vais changer de team pour rejoindre BH-SR Suntour-Peisey Vallandry. Ce sera un nouveau challenge. Avant cela, je vais partir en vacances en Nouvelle-Zélande jeudi, poser le vélo et faire un peu de tourisme. On reprendra ensuite la préparation hivernale pour faire une bonne saison en Coupe du Monde l'année prochaine.

Ta victoire au Roc d'Azur, c'est finalement un beau cadeau d'adieu au team TX Active-Bianchi ?
J'avais à cœur de bien partir avec Bianchi, avec qui ça s'est bien passé pendant six ans. J'avais déjà terminé 2ème de la GimondiBike, la course de l'équipe. J'avais une revanche à prendre sur la dernière course. Quand on a la forme au Roc, il y a moyen de faire une belle course. J'avais déjà fait des Tops 10, mais dans des configurations plus groupées. Je ne pensais tout de même pas partir seul de suite, mais faisant la différence dans les descentes, je pouvais en profiter pour creuser l'écart.

11ème et 1er Français des Jeux Olympiques, vainqueur du Roc d'Azur, tu t'es affirmé cette année comme le meilleur pilote français ?
Le meilleur, je ne sais pas, mais j'ai fait une belle saison. Le but, à terme, sera d'aller chercher un podium aux Jeux de Rio. Mais il y a encore des paliers à franchir en Coupe du Monde, où je n'ai jamais obtenu de podium. J'espère que ce sera pour l'année prochaine. Je vais travailler dans ce sens pour monter dans l'échelon mondial.

Tes objectifs, la saison prochaine, ce seront les Coupes du Monde et les Championnats du Monde ?
Bien sûr, le programme international, et puis il y aura aussi le Championnat de France. Avec Maxime Marotte, on pourra peut-être essayer de faire une course d'équipe face à Julien Absalon pour aller chercher un titre.

Avec Maxime Marotte, Julie Bresset et toi, BH-SR Suntour-Peisey Vallandry va devenir l'un des plus gros teams de la planète ?

Je crois que nous devenons le deuxième team derrière Specialized, qui reste une grosse structure. Deuxième derrière, ce n'est pas rien. Mais ça c'est sur le papier, à nous de montrer ce qu'on sait faire l'année prochaine.

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